Devoir de conseil et souscription en ligne
Le conseil est consubstantiel à la commercialisation des produits d’assurance et d’investissement quel que soit le canal utilisé.
Le devoir de conseil n’est pas né avec l’arrivée de la DDA ou de MIFID. En France, le code des assurances comme le code monétaire posent le principe qu’il n’y a pas de vente de produits d’assurance et/ou d’investissement sans conseil. En réalité, cette obligation est, depuis très longtemps, associée à la vente de produits d’assurance1. Les directives européennes ont renforcé son déploiement en normant les conditions dans lesquelles le conseil doit être rendu. Le premier acte est, bien évidemment, l’évaluation des besoins de celui qui recherche une garantie pour ensuite proposer une réponse adaptée. Et, personne, quel que soit le média de vente utilisé ne peut s’en affranchir.
Or, le recours à un site internet se traduit souvent par une procédure de souscription resserrée qui conduit rapidement à la concrétisation de la vente. La phase de recueil des besoins est réduite à sa plus simple expression. La dictature des « trois clics » s’est imposée. Ce n’est bien évidemment pas conforme au code des assurances. Comme vient de le rappeler le Médiateur de l’assurance en précisant que la souscription en ligne doit permettre la mise en œuvre du devoir de conseil par le distributeur d’assurance. Ce qui n’était pas le cas de la situation qu’il a analysée. Il a donc invité l’assureur qui contestait le sinistre à le prendre en charge à hauteur de 80%.
L’obligation de conseil, telle qu’elle est imposée par les textes européens, consiste en la formalisation d’une recommandation préalable à l’acte de vente. Ce qui implique que l’évaluation des besoins doit vraiment les révéler et pas seulement conduire ipso facto à la souscription du contrat. C’est d’ailleurs ce que l’ACPR2 a cherché à faire en précisant les bonnes pratiques et notamment les modalités de recueil des informations sur les clients : leur profil, leur aversion au risque et la traçabilité de leurs données. Cette formalisation, marque une révision profonde des pratiques commerciales y compris dans la vente directe. Un process qui ne met pas en évidence les besoins, ne permet à l’évidence pas de fournir une prestation de conseil.
Le renforcement du devoir de conseil s’inscrit dans une tendance lourde. La jurisprudence l’a déjà installée dans le marbre des relations des professionnels avec leurs clients. C’est d’ailleurs une revendication des citoyens, bien relayée par les organisations de consommateurs. Ce n’est donc pas une nouveauté. Toutefois, il ne faut pas s’y tromper : ce qui est en mouvement montre que c’est bien un objectif de qualité qui se dessine. Pour ceux qui auraient encore des doutes ou qui penseraient pouvoir s’affranchir de ces contraintes, il faut qu’ils soient conscients que les révisions réglementaires qui se profilent sont en train de resserrer encore les obligations autour du devoir de conseil. La RIS3 notamment, encore en débat au sein des instances européennes, pourrait lier le sort des commissions à la délivrance du conseil.
1 En fait, depuis la loi de 1930 sur le contrat d’assurance
2 ACPR : Autorité de Contrôle Prudentiel et de Révision C2013-R-01 du 8 janvier 2013
3 Retail investment strategy.
Henri DEBRUYNE