DEVOIR DE CONSEIL DU COURTIER – PRECISIONS DE LA COUR DE CASSATION

par | 3 Avr 2025 | Brèves

La société Cuirs du futur (CDF) a, par l’intermédiaire de son courtier, souscrit une assurance RC ; elle utilise, pour les besoins de son activité de fabrication de cuir, un produit de teinture fabriqué par les sociétés BASF Española et Indigo chimie, et distribué par la société Indigo Quimica. Suite à des réclamations de ses clients (pour certains situés outre-Atlantique) relatives à des problèmes de déchirure des cuirs traités avec cette teinture, CDF fait effectuer une expertise judiciaire puis assigne ses fournisseurs et leurs assureurs, ainsi que ses propres courtier et assureur.

La tannerie reproche à son courtier de ne pas avoir attiré son attention sur l’absence de garantie des dommages survenant aux Etats-Unis ou au Canada. Elle soutient notamment que « le courtier est tenu d’un devoir de conseil sur les caractéristiques des produits d’assurance qu’il propose et sur leur adéquation avec la situation personnelle et les attentes de ses clients, qui doit être fourni préalablement à la signature du contrat ». Déboutée par la Cour d’appel de Toulouse, CDF se pourvoit en cassation.

Dans un arrêt du 19 mars développé en deux temps, la Cour de cassation déboute également Cuirs de France de son action en responsabilité. Pour ce faire, elle relève, d’une part, que le courtier ignorait qu’une partie de l’activité de l’assuré était exercée aux Etats Unis et au Canada et, d’autre part, que l’assuré pouvait aisément comprendre à la lecture de la police que ces zones géographiques n’étaient pas couvertes.

1/ Tout d’abord, le devoir de conseil du courtier s’exerce à partir des déclarations faites par l’assuré. Il n’a pas d’obligation d’investigation ou de renseignement. En l’espèce, l’assuré n’est pas fondé à reprocher à son courtier d’avoir omis de se préoccuper de la couverture de son activité aux Etats Unis et au Canada alors qu’il ne l’avait pas informé d’une telle activité.

2/ D’autre part, il n’y a pas de devoir de conseil à la charge de l’assureur ou du courtier lorsque la lecture des clauses précises et claires de la police permet de connaître les conditions du contrat. En l’espèce, il était clairement indiqué dans la police que les sinistres aux Etats-Unis ou au Canada n’étaient pas couverts. Ainsi, s’il avait lu son contrat, l’assuré devait savoir que les sinistres survenant dans cette zone géographique n’étaient pas couverts.

Parmi les commentateurs de cet arrêt, plusieurs s’interrogent malgré tout sur la notion de devoir de mise en garde et sur la preuve de la connaissance des exclusions par l’assuré. Il appartiendra à la Cour d’appel de Bordeaux devant laquelle l’affaire est renvoyée, de démêler ces aspects largement factuels.

Source : Cour de cassation N° 23-16.193

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